Les citoyens de l’UE qui ont demandé à rester en Grande-Bretagne sont menacés d’expulsion

Des citoyens européens qui ont demandé le statut de résident permanent sont détenus et menacés d’expulsion, une évolution qui contredit les assurances des ministres et semble contrevenir à l’accord de retrait du Brexit.
Le ministère de l’Intérieur a signifié à des ressortissants de l’UE des ordres d’expulsion alors même qu’ils pouvaient prouver qu’ils avaient demandé le statut de résident permanent, qui devrait protéger leurs droits à rester au Royaume-Uni.
Les ministres ont promis à plusieurs reprises que toute personne ayant déposé une demande avant la date limite du 30 juin verrait ses droits existants protégés pendant l’examen de son dossier.
Le non-respect apparent de cet accord a suscité des accusations d'”incompétence administrative” de la part des fonctionnaires du ministère de l’Intérieur ou de tentative “délibérée” d’expulser le plus grand nombre possible de ressortissants de l’UE, en partant du principe qu’ils sont plus faciles à expulser que les demandeurs d’asile, par exemple.
Une lettre de l’organisation caritative Bail for Immigration Detainees (Bid) adressée au responsable de l’application des lois sur l’immigration, datée du 29 juillet, s’inquiète du fait que le ministère de l’Intérieur n’accuse pas réception des demandes de statut permanent dans les cas où il souhaite expulser des citoyens européens.
Bid indique qu’à moins de recevoir une réponse significative du Home Office d’ici la fin de la semaine, il déposera une plainte officielle auprès de la Commission européenne.
Les avocats affirment que cela marque une bataille importante pour protéger les droits des ressortissants de l’UE après le Brexit. Ils préviennent que l’absence d’accusé de réception des demandes pourrait potentiellement affecter des milliers de personnes.
Vendredi, un citoyen européen que le ministère de l’Intérieur voulait expulser et qui avait été placé en détention dans un centre d’éloignement des immigrants a obtenu sa libération sous caution après qu’un juge a reconnu qu’il ne pouvait pas être expulsé parce qu’il avait déposé une demande EUSS.
Malgré cela, le ministère de l’Intérieur a continué à contester leur libération et n’a présenté aucune excuse ni explication quant à la raison pour laquelle il avait précédemment soutenu qu’il n’y avait aucune preuve de la demande lors d’une audience précédente et qu’il pouvait donc les expulser.
S’exprimant peu après sa libération, le ressortissant européen, qui a requis l’anonymat, a déclaré à l’Observer : “Ils essaient de jouer avec ma vie et celle de ma famille et ce n’est pas juste. Je suis censé avoir des droits”.
Pierre Makhlouf, directeur juridique de Bid, a déclaré : “Il semble que le ministère de l’Intérieur ait décidé à l’avance du sort de certains ressortissants européens, pensant peut-être qu’ils sont faciles à expulser. Mais dans sa volonté d’expulser davantage de personnes, il contourne les exigences et les procédures légales.
“Il est difficile de savoir si cela est dû à une négligence administrative ou volontaire, mais en ignorant les démarches juridiques entreprises par les ressortissants de l’UE pour faire valoir leurs droits, le Royaume-Uni manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l’accord de retrait.”
Le problème semble concerner principalement les demandes envoyées par courrier au lieu d’être transmises par voie numérique. Araniya Kogulathas, avocate et responsable juridique du projet EEE (Espace économique européen) de Bid, a déclaré que les demandes papier étaient utilisées par de nombreuses personnes vulnérables et marginalisées, notamment les personnes âgées et les personnes en détention ou en prison qui ont des difficultés à accéder à un ordinateur ou n’ont pas accès à un document d’identité valide.
Le nombre de personnes concernées pourrait être important. Par exemple, sur les 1 500 détenus de la prison de Wandsworth, dans le sud de Londres, près de 500 seraient des ressortissants de l’UE.
Kogulathas a déclaré : “Bien qu’ils aient déposé une demande d’asile, les ressortissants de l’EEE sont privés de leur liberté et reçoivent même des ordres d’éloignement, qu’ils sont contraints de contester malgré un accès limité aux conseils et à la représentation juridiques.
Elle a ajouté : “Ces défis sont particulièrement difficiles à relever pour les personnes détenues en vertu des pouvoirs de l’immigration dans les prisons, dont certaines sont enfermées dans leurs cellules pendant environ 23 heures par jour, voire plus, en raison de la pandémie.”
Conscients de ces difficultés, les ministres ont promis une période indéfinie pendant laquelle les personnes n’ayant pas déposé de demande seraient autorisées à le faire, si elles avaient des motifs raisonnables.
Parmi les cas connus de Bid, il y en a un où le ministère de l’Intérieur n’a pas accusé réception d’une demande EUSS soumise à la mi-juillet, déclarant qu’il n’y avait “aucun obstacle à son éloignement et que les directives d’éloignement seraient bientôt fixées”. Un autre cas concerne un citoyen européen qui, bien qu’ayant soumis une demande EUSS en ligne, a reçu des instructions d’éloignement du ministère de l’Intérieur.
Un porte-parole du ministère de l’Intérieur a rejeté les allégations comme étant “totalement infondées” et, bien qu’un certain nombre de cas mentionnés dans l’article aient été contestés par le ministère de l’Intérieur devant les tribunaux de l’immigration – le dernier en date étant survenu vendredi – a affirmé que “l’Observer n’a pas réussi à fournir la moindre preuve que des ordres de détention ou d’éloignement sont donnés aux personnes ayant le statut EUSS Settlement Scheme”.
Ils ont ajouté : “Notre approche signifie que si les services d’immigration rencontrent une personne sans EUSS mais qui pourrait être éligible, nous travaillerons avec elle pour lui permettre de faire une demande et l’orienter vers l’aide disponible. Si une personne a déposé une demande de statut de résident permanent dans l’UE avant la date limite du 30 juin, mais n’a pas encore reçu de décision, ses droits sont protégés jusqu’à ce qu’elle ait reçu une réponse.