A table! Frenchie, la bonne adresse du déconfinement

Premier vendredi soir déconfiné, plein soleil en cette fin d’après midi. Aucune excuse pour les londoniens sortis braver le froid coûte que coûte afin de regagner un semblant de vie normale. Covent Garden est animé, les terrasses aménagées à même la rue sont pleines. Heureusement pour nous, celle du Frenchie, adresse jumelle à Londres du Frenchie parisien du chef étoilé Greg Marchand, est chauffée. La maître d’hôtel, bienveillante, nous accueille (en français bien sûr!) et nous explique rapidement le concept: un menu à la carte, des plats à partager – étonnant en période de covid, mais tout de même bien plus convivial. Ceci dit, il est tout à fait possible de se la jouer égoïste et de chacun commander à sa guise, les prix étants bien raisonnables pour la qualité du repas qui nous attend. La carte est variée mais concise, reprenant les codes “brasserie” avec des plats réconfortants, sobres et sans chichis, mais toujours préparés avec délicatesse. C’est là l’esprit de Frenchie, qui n’est autre que le surnom que donne au chef Greg Marchand un autre chef renommé: Jamie Oliver.

Les scones à gauche, les gougères à droite. Photo par Noisette Martel
Notre serveuse, Paula, se présente à nous avec beaucoup d’attention. Très à l’écoute, elle nous explique le menu en détails, montrant une connaissance parfaite des plats. Difficulté rajoutée à l’exercice: la jeune femme portugaise insiste pour nous expliquer en français pour pouvoir progresser. Nous finissons par commander deux amuses bouches, une entrée et un plat à partager ainsi qu’une selection de fromages et chacun des deux desserts. Une bonne quantité, certes, mais de quoi goûter au maximum de ce qu’a à offrir ce petit bout de Paris en plein coeur de la capitale britannique. Spoiler alert: nous n’avons pas étés déçues!

Le carpaccio de dorade. Photo par Noisette Martel
- Les amuses bouches
Pour nous mettre en condition, nous avons commencé par les scones au bacon, sirop d’érable et leur crème. Bouchées plutôt sucrées, le salé du bacon se fait discret et la caramélisation du sirop d’érable est contrebalancée par la fraicheur de la crème, dont la texture rappelle un peu celle du beurre. Plus dans la fraicheur justement, ce sont les gougères de parmesan faisant suite qui ont le plus animé nos papilles. D’apparence assez simples, ces petits choux fourrés sont relevés tout simplement par quelques zestes de citron sur le dessus, leur donnant une balance parfaite entre le gras du fromage et l’acidité de l’agrume.

Le poulet morilles. Photo par Noisette Martel
- Les plats
Nous avons ensuite attaqué l’entrée. Au départ partantes pour deux plats, nous avons au dernier moment décidé de partir sur une portion plus petite, de peur d’avoir trop à manger. Alors que nous n’avions pas au départ considéré le carpaccio de daurade – cela aurait été une grosse erreur! Véritable coup de coeur du repas, ces fines feuilles de dorade sont servies avec un exquis sabayon de ciboulette et un condiment de concombre et jalapeño. Conseil: prenez un peu de tout en bouche, ainsi qu’un quartier de fraise sur le dessus et laissez vous emporter. Le punch du condiment prend place au milieu de la douceur herbacée du sabayon vert, faisant ressortir la fraicheur de la dorade. En note finale, la sucrosité de la fraise vient apaiser le piquant au palais. Juste magique. Une fois remises de nos émotions, c’est au tour du plat: un poulet morilles, énoncé classique, mais execution parfaite. Le poulet est servi avec une farce de brioche verte aux herbes et à l’ail, relevée par un peu de citron, qui vient raviver la rondeur des sucs et du sabayon au Fino Sherry. Les morilles sont cuites à la perfection apportant de la mâche, les asperges blanches ramènent de l’amertume et les pommes de terre sont si tendres et sucrées qu’elles semblent confites. Dans ce plat tout est simple, mais tout se répond et s’accorde comme pour rester en équilibre sur le plat de la langue, pendant que la rondeur des saveurs réconfortantes enveloppe le palais.

Les fromages. Photo par Noisette Martel
- Fromages et desserts
Pour finir un repas en bonnes françaises, nous avons bien sûr demandé du fromage: un bon camembert fort en caractère servi avec son miel de saison ainsi qu’une douce tomme de Savoie au goût noisetté. Surprise, ceux-ci ne sont pas servis avec du pain mais avec une sorte de fine tuile parsemée de graines d’anis et de fleur de sel et de crackers aux grains fait maison. Un conseil: ne mangez plus jamais de fromage autrement. Le premier dessert que nous dégustons est la tarte pistaches rhubarbe, servie avec sa crème fraiche. Bien que seule la pâte de pistaches aurait pu être un poil trop sucrée, manger le tout avec l’acidité de la rhubarbe et la fraicheur de la crème remet tout dans l’ordre. Afin de finir au mieux, sur une touche de légèreté, nous finissons par un twist aérien d’un classique des desserts anglais: le banofee pie – entendez, tarte caramel et banane. Ici, pas de fond de tarte mais une poudre de crumble aux pécans. Pas de litres de caramel mais un nuage de crème caramel saupoudré de muscade et de fleur de sel. Pas de quartiers de bananes ramollis mais un sorbet délicat et frais au centre de cette nébuleuse. Pour ce dessert habituellement lourd et sucré, tout est léger, tout est tendre. Parfaite fin pour ce dîner bien mérité après des mois passés chez soi.

La tarte rhubarbe pistache. Photo par Noisette Martel
En bref, de cette expérience nous retenons la qualité du service, la délicatesse des assaisonnements, la justesse des saveurs mais surtout l’émotion incroyable et inattendue que nous avons ressenti en dégustant ce carpaccio de dorade magique. Alors courrez chez Frenchie vous faire plaisir, vous l’avez bien mérité!

Le Banoffee. Photo par Noisette Martel