Le film anglo-polonais-ukrainien “Mister Jones”, réalisé par Agnieszka Holland, risque bien de passionner les salles de cinéma britanniques en 2020. Le film est inspiré de l’histoire vraie de Gareth Jones, incarné par James Norton, journaliste freelance gallois, spécialisé dans les régimes totalitaires.
Le but de sa vie était de rencontrer Staline et Hitler. Peu commun n’est-ce pas ? Et pourtant c’est l’objectif de vie que s’est fixé Gareth Jones. Alors qu’il a 25 ans lors de la montée des régimes totalitaires en Europe, le journaliste gallois se démarque des autres en devenant le premier journaliste étranger à voyager dans le zeppelin du chef du parti nazi. De retour à Londres, il devient le conseiller en politique étrangère du Premier ministre de l’époque, George Lloyd, mais quitte son poste lorsqu’il décide de partir pour Moscou …
Découvertes glaciales au cœur de l’hiver russe
Curieux de voir comment l’Union Soviétique a fait pour se développer aussi rapidement, le jeune et ambitieux reporter Gareth Jones part à Moscou pour son prochain article. Il n’est pas encore arrivé qu’il se heurte déjà à la lourde machine bureaucratique soviétique pour récupérer son visa. Une fois sur place, il se rend compte progressivement que les correspondants étrangers subissent des pressions du pouvoir. Mais cela n’arrête pas la fougue du jeune journaliste. Alors qu’il essaye d’obtenir une interview de Joseph Staline, sa quête va le mener au milieu du « countryside » soviétique. Le périple commence alors et Gareth Jones et l’Europe ne sont pas prêts pour ce qu’il va découvrir. Entre la rudesse de l’hiver russe et les failles du modèle soviétique, les découvertes macabres s’enchaînent.
Un voyage précurseur réussi
Le film met la lumière sur une des nombreuses catastrophes du XXème siècle : le stalinisme. Si l’œuvre se veut une critique tout entière du système communiste, c’est pourtant bien l’URSS des années 1930 et seulement celle-ci que le film met en lumière. C’est un système inégalitaire qui exploite les travailleurs, aux antipodes de la doctrine marxiste, qui y est montré. Les paysans de la campagne envoient toutes leurs récoltes à Moscou, et ne reçoivent en retour que des bouchées de pain. Toute opposition est systématiquement noyée dans un bain de sang. Si le fond est cohérent de bout en bout, la forme met en exergue admirablement le message du film. Les décors sont magnifiques, des palais moscovites aux bicoques campagnardes, en passant par l’ambiance glaciale de l’hiver russe. La bande-son, dirigée par Antoni Lazarkiewicz rythme également correctement le film, jusqu’à un coup d’éclat où des enfants chantent leur abominable quotidien entre faim, froid et mort. Des paroles qui viendront hanter Gareth Jones au fur et à mesure de ses découvertes et de la détérioration de sa santé. Le film ne sort que le 24 février 2020 au Royaume-Uni, l’hiver sera aussi long et interminable que le grand froid russe !
Alexandre Mondragon