C’est les larmes aux yeux et la voix tremblotante que John Bercow a annoncé sa démission de son poste de Speaker de la Chambre des Communes le lundi 9 septembre.
« Ordeeeeer » Ce mot désormais célèbre était la marque de l’ancien député conservateur. Devenu un « même » sur Internet, son gimmick a marqué de son empreinte les débats sur le Brexit qui durent depuis maintenant plus de 3 ans. Ses cravates fantaisistes n’égaieront plus les joutes verbales des parlementaires.
Bercow, down but not out. House stands to applaud resignation speech of speaker John Bercow – joined by just a handful of Tories – his own party. Two-faced Gove managed a response to a magnificent send-off from Jeremy Corbyn. pic.twitter.com/XTyqpceqWj
— Brexitshambles (@brexit_sham) September 9, 2019
Un parcours atypique et précoce
Né en 1963 d’un père chauffeur de taxi, John Bercow n’est pas issu d’un milieu favorisé comme la plupart de ses collègues de Westminster. Fort d’un engament politique dès l’université, il se lance en politique sous l’étiquette conservatrice. Elu pour la première fois à la Chambre des Communes en 1997, il accèdera au poste de Speaker en 2009. A seulement 42 ans, il obtient donc un poste prestigieux réservé principalement à des parlementaires chevronnés, assis sur les bancs de Westminster depuis des dizaines d’années. Cette précocité fait de lui le Speaker le plus jeune de la Chambre basse du Parlement, un poste qui existe depuis environ 800 ans ! John Bercow ne fait rien comme les autres et va utiliser sa jeunesse pour s’attacher à dépoussiérer l’image du Parlement. Le nouveau chef de la Chambre des Communes abandonne certains habits traditionnels du Speaker comme la perruque et autorise en juin 2017 les députés à siéger sans cravate.
Au cœur des débats du Brexit
Le désormais ex-speaker a mené la vie dure aux gouvernements tories successifs. Pourtant issu de leurs rangs, il a dû abandonner son adhésion au parti conservateur puisque son rôle de Speaker fait de lui le garant de la neutralité des débats. Si John Bercow s’est attaché à respecter l’équité du temps de parole, ses décisions ont fait grincer les dents dans les rangs conservateurs, notamment son refus de recevoir Donald Trump au Parlement. Le chef de la « House of Commons » fut régulièrement accusé de favoritisme au cours des débats sur le Brexit au profit des anti-Brexit. En mars, John Bercow avait pris de court l’exécutif alors dirigé par Theresa May puisqu’il a refusé un nouveau vote sur l’accord de Brexit négocié avec l’UE mais déjà rejeté par les députés. Début janvier, contre l’usage, le Speaker avait décidé de soumettre au vote un amendement au projet de Brexit du gouvernement. Son initiative, qui réduisait les marges de manœuvre de l’exécutif au bénéfice des parlementaires, avait été jugée favorable au camp pro-UE par le camp eurosceptique. Plus récemment, il avait qualifié de « scandale constitutionnel » la décision de Boris Johnson de suspendre le Parlement. Les applaudissements appuyés des parlementaires à la fin de discours sont un juste remerciement pour celui qui a supervisé et contrôlé les débats de Westminster depuis 10 ans. La course à sa succession est déjà lancée et plusieurs parlementaires se sont déjà positionnés. Qui sera à la hauteur de John Bercow ?
Alexandre Mondragon