Un amoureux de son chien et de la photographie, voilà une description qui sied à merveille à David Abiker. Le journaliste français a prêté sa plume pour l’édito du nouveau livre de photographie de Sonia Fitoussi, artiste immortalisant de manière insolite le Royaume-Uni notamment dans son ouvrage Brexit Diary. Portrait d’un homme au regard décalé.
Quand Sonia Fitoussi et David Abiker se sont rencontrés, le courant est tout de suite passé. Elle aimait son style d’écrivain, il appréciait ses photographies. Quand David Abiker est interrogé sur le pourquoi il a choisi de rédiger l’éditorial du livre de Sonia Fitoussi, sa décision semble couler de source : « J’aime beaucoup Sonia et j’aime les photos de Sonia alors j’ai dit yes. » Dans le travail de l’artiste française installée à Londres, ce sont « les contrastes entre les messages et les personnages » qui ont particulièrement retenu son attention. Mais son intérêt pour la photographie est plus global, puisqu’il est sensible à d’autres photographes. Quand Londres Mag lui a posé la question, il a tenu à évoquer des artistes « vivants », et notamment son « grand ami Sacha Goldberger et Ellie Davies, une photographe anglaise qui montre la forêt comme personne. » Son goût pour leurs travaux est tel que ces photographes sont exposés chez lui.
David Abiker a aussi son propre avis sur les mégalopoles actuelles et sur le Brexit. Pour lui, « les grandes capitales du monde » sont des lieux « où les citadins passent leur vie dans un paysage urbain où ils sont bombardés de messages publicitaires. » Et c’est aussi ça qui fait la spécificité de l’art de Sonia Fitoussi : « Sonia aime bien jouer avec les images publicitaires et les scènes de la vraie vie. » Quant à la vision du Brexit du journaliste d’Europe 1, elle est sombre. Comme il le dit si bien, c’est un évènement politique incontournable, a fortiori quand on est journaliste : « Ne pas s’intéresser à la vie politique anglaise en ce moment c’est un peu comme prétendre aimer le foot sans regarder les matchs… »
Mais là, le Brexit semble plus être une arène qu’un terrain de jeu. C’est ce qui fait dire au journaliste que ce tournant dans la vie politique intérieure et extérieure du Royaume-Uni est une « rupture ». Il rajoute : « On se fait larguer par les Anglais, nous, les membres de l’Union… ». Selon lui, la responsabilité du chaos actuel revient en partie aux membres du gouvernement britannique : « C’est une grande déconnade le Brexit. Promettre le départ aux Britanniques sans leur dire quelles en seront les conséquences c’est déconner… ». Le journaliste ne semble pas être très optimiste sur l’issue de l’évènement. C’est ce qui le pousse à affirmer que « Le Brexit est long. Et ce n’est pas fini. Je suis sûr qu’avec Boris Johnson le hard Brexit ne sera pas si facile et si rapide. Scènes de ménage en vue avec l’Europe… ». L’art, et précisément celui de Sonia Fitoussi, permet selon lui de panser les blessures provoquées par le déchirement du Brexit : « L’art est universel, il se moque des frontières et de la politique. L’art fabrique des ponts. Sonia, en nous montrant les Anglais, fait la démonstration qu’ils ont quelque chose qui nous séduira toujours. »
Si l’art est aussi important pour David Abiker, c’est peut-être parce qu’il a lui-même appartenu à ce milieu. En effet, il est l’écrivain de plusieurs ouvrages, dont l’homme moderne était le sujet de prédilection. Mais quand on lui parle de cette période de sa vie, il reste nuancé : « Écrivain c’est beaucoup dire. Je n’ai rien publié depuis 8 ans. J’admire la patience et la détermination des artistes. Je dois abriter en moi un artiste qui sommeille. Il faudrait que je le réveille… » Les titres de deux de ses livres principaux, Le musée de l’homme : le fabuleux déclin de l’empire masculin et Le mur des lamentations : tous victimes et fiers de l’être témoigne d’une certaine vision de la littérature. Alors David Abiker, provocateur ? Le journaliste refute : « Ils l’étaient peut-être. Tout travail doit contenir une provocation. Violente ou sous-entendue. L’expression artistique ou littéraire doit avoir l’ambition de faire réagir. Ceci dit j’ai très envie d’écrire sur mon chien un jour. Pas très provocateur. ».
Thalia Creac’h
PRATIQUE
Signatures de l’ouvrage : A Brexit Diary sort le 22 juin
Samedi 22 juin, 13h à 15h à La Page , Harrington Road, South Kensington
Mardi 25 Juin, à partir de 18h30, chez Nomad Book, 781 Fulham Road