A l’occasion de son concert au Rough Trade le 27 mars dernier, Londres Mag a rencontré Pauline, la chanteuse fun du Groupe Pi Ja Ma.

© Johanna Arnoult
Londres Mag : «Nice to meet U» c’est une façon de se présenter, mais aussi le nom de votre premier album. Pourquoi avoir choisi ce nom ?
Pauline : Le fait que je fasse de la musique et qu’on se soit rencontré avec Axel (l’autre membre de PI JA MA ndlr) est axé autour des coïncidences, du hasard, tout a été un peu improvisé et sans ces rencontres un peu hasardeuses, il ne se serait probablement rien passé, je n’aurais pas fait de musique, parce que je m’en sentais pas trop capable. La rencontre avec Axel a été un déclic de fou, on a commencé à se voir tout le temps, à écrire des chansons et on s’est dit que Nice to meet U était un super titre de premier album parce qu’en plus, nous avons rencontré énormément de gens tout au long de l’année avec qui on a fait des clips, des concerts… Et le U c’est pour le langage texto parce que moi je suis tout le temps connectée aux réseaux sociaux, j’ai 22 ans et c’était un peu un clin d’œil, que ce soit sur un album de jeunesse.
LM : Votre single est Pony Tail, mais de quoi s’agit-il ?
P : C’est une des premières chansons pour laquelle j’ai écrit les paroles. Avant je n’écrivais pas les paroles parce que ça me stressait un peu, j’avais comme un complexe de l’écriture. Elle n’a un peu aucun sens en fait, c’est l’histoire d’une fille qui a trop bu, et quand elle se réveille, elle est complètement dans un autre monde et elle veut que ça s’arrête. J’ai écrit cette chanson suite à une expérience personnelle, j’avais pris une drogue une fois et les effets ne se dissipaient pas, j’étais dans un autre monde, je voulais que ça s’arrête et je me suis dit que ce serait drôle d’écrire une chanson un peu plus légère et où les gens ne pourraient pas forcement comprendre de quoi je parle (rires). C’était une sorte de Radio Girl numéro 2, qui est notre premier single et c’est une chanson que j’adore, en concert elle est hyper fun! Donc voilà, Pony Tail ça ne veut rien dire, c’est « queue de cheval » (rires)
LM : Qu’est ce qui vous a donné envie de faire ce que vous faites aujourd’hui ?
P: En fait c’est bizarre mais j’ai l’impression que je ne peux rien faire d’autre que ce qui touche au domaine artistique. C’est à dire que je dessine, je chante, j’écris, je fais des videos et tout le reste je suis genre cassée en deux, genre j’suis nulle dans tout le reste (rires). Par contre ça, j’ai l’impression d’avoir des facilités à le faire. Je suis hypersensible j’ai toujours envie de faire plein de choses, et ça se combine bien. Pour la musique, j’ai eu de la chance, je chante juste du coup je me suis dit que je devais en faire quelque chose, et quand j’ai rencontré Axel, nos deux univers musicaux se connectaient vraiment très bien, alors on s’est dit qu’on allait faire un album ensemble. Tout a été hyper fluide, ce n’était pas des sessions de travail c’était des sessions d’amitié, et on rigolait beaucoup. Parfois j’ai l’impression d’avoir trop de chance, tout est trop simple, c’est un peu bizarre, mais en même temps je travaille énormément pour obtenir tout ça.
LM : Quelle est la différence entre Pauline et Pi Ja Ma ?
P: Je pense que Pi Ja Ma c’est vraiment l’association d’Axel et moi. Pi Ja Ma, c’est un personnage que j’ai créé, qui est le moi qui assume complètement de chanter, d’apparaitre dans les clips. Et puis ça traite énormément de thèmes légers et d’amusements, alors que moi, Pauline, parfois, dans les BD et dans la vie, je raconte un peu plus de trucs déprimants, plus terre à terre, même si je suis une grande rêveuse.Pi Ja Ma c’est vraiment censé avoir un coté positif et doux, alors que moi avec mes amis j’ai plutôt l’impression d’être assez pessimiste, et le coté plus « dark » et réel est effacé avec Pi Ja Ma
LM : En étant également illustratrice, vous avez un intérêt particulier à l’image. Comment choisissez-vous l’atmosphère de vos vidéos clips et pochettes d’albums ?
P : Ça ne s’explique pas vraiment, mais dès que j’entends une chanson ou un mot, j’ai tout de suite les images qui me viennent en tête. Depuis que je suis petite, j’ai ce truc de synesthésie, on me dit un mot ou un chiffre et je vois une couleur ou j’entends « banane » et je pense tout de suite à plein de choses. C’est parfois un peu handicapant parce que j’ai l’image de la chanson et après je me sens obligée de faire le clip que j’ai imaginé. Et c’est parfois difficile de travailler avec d’autres personnes parce que j’ai une image hyper précise de ce que je veux, et c’est aussi pas mal de négociations, mais j’essaie de lâcher de plus en plus les rênes car je ne peux pas toujours tout contrôler. Et puis parfois il y a de super idées que moi-même je n’aurais pas eues. J’essaie également de m’entourer un peu plus de filles. J’ai plein d’amis garçons mais dans le travail, et donc en ce moment je me dis pourquoi pas choisir une ingénieur du son fille ou une réalisatrice, c’est ma petite résolution 2019 (rires)
LM : Qu’est-ce que ça représente pour vous de jouer à Rough Trade, label qui a signé de grands noms internationaux et anglo-saxons ?
P : Je connaissais l’endroit de nom mais le fait d’entrer dans le store et de voir l’ambiance, ça m’a tout de suite donné envie de rester. On voit tout de suite que c’est un lieu de passionnés. Je ne connais pas trop le label mais le magasin est mignon, il y a des cds dédicacés, des fanzines et je me dis que si nous sommes invités à chanter ici, et qu’en plus notre disque s’y vend, ça veut dire qu’on fait un peu partie dans cette famille de gens qui aiment écouter plein de trucs différents. En Angleterre Pi Ja Ma s’est toujours senti super bien parce qu’on a l’impression que les gens comprennent la musique que l’on fait. Parfois en France c’est un peu compliqué, les gens nous demandent « pourquoi vous chantez en anglais et pas en français, pourquoi vous ne faites pas de l’électro ». Ici j’ai l’impression qu’il y a une compréhension immédiate de notre musique et c’est assez cool. J’espère que le concert sera chouette !
LM : Un rituel avant vos concerts ? Et avant de dessiner ?
P : On boit des bières malheureusement (rires) et on crie un peu, moi j’aime bien chanter des chansons hyper aiguës, ça me défoule vachement, je hurle du Kate Bush ! Et puis parfois on se fait des câlins.
LM : Un souvenir de votre premier concert ?
P : Notre tout premier concert, je crois que c’était à la Maroquinerie, en première partie d’un groupe de Bordeaux. Et la Maroquinerie, c’est une salle où les groupes se produisent une fois qu’ils ont tourné dans tous les bars, nous c’était notre tout premier concert ! Alors j’étais super stressée, nous n’étions pas sûrs de nous, mais dès l’instant où j’ai mis le pied sur scène j’ai été transcendée ! Après ça je voulais monter sur scène toutes les semaines, alors que quelques heures avant je me demandais pourquoi je faisais ça. J’ai eu le syndrome de l’imposteur jusqu’à très tard et finalement, chaque concert que nous faisons me confirme que je suis faite pour ça et que j’adore faire ça. Et puis j’aime bien ce rôle que j’ai de fille qui fait un peu du rock, de la pop et j’essaie aussi d’écouter plus d’artistes féminines sur mon Spotify parce que j’écoute quasiment que des mecs et j’me dis il y a 15 filles qui sont une inspiration pour moi, alors peut-être que moi je suis une inspiration pour d’autres femmes. Parce que tous ces métiers où ” on doit avoir du cran “, je me dis c’est cool moi j’arrive je monte sur scène, ça fait un peu changer les choses et peut-être que d’autres jeunes vont se dire qu’eux aussi, ils peuvent le faire.
LM : Qui sont vos sources d’inspiration ?
P : Je cite souvent Patti Smith, pas seulement pour sa musique mais surtout pour ce qu’elle a écrit, comment elle se comporte, les vêtements qu’elle porte. J’ai l’impression qu’en ce moment la femme s’affirme, qu’il y a une espèce de montée du féminisme, et c’est trop cool de voir que tu peux être une femme et faire ce que tu veux. J’ai l’impression de me retrouver là dedans et pour moi c’est normal qu’une femme soit féministe. Quand j’étais plus jeune, c’est ce genre de message que j’aurai aimé entendre un peu plus.

© Johanna Arnoult
LM : Quels sont vos projets ?
P : Nous venons de sortir notre premier album, mais on bosse déjà sur le deuxième, et je pense qu’il sera encore plus porté sur l’illustration. J’essaie d’utiliser le côté réseaux sociaux à bon escient. Par exemple, sur mon Instagram, je préfère poster des images drôles, des dessins ou des choses artistiques, plutôt que des selfies. J’aimerais bien partir sur un deuxième album avec un univers très illustré où les clips sont en animations, essayer de ramener cette ambiance qui à la base, était un projet : 50 % de musique 50% d’image. J’ai l’impression que parfois la musique prend un peu plus le dessus alors pour le deuxième album, j’aimerais un concept où il y aurait une histoire, avec par exemple une histoire entre la première et la dernière chansons, comme des épisodes entre les deux. Mais cela prend énormément de temps à faire et à mixer.
LM : Où vous voyez-vous dans 10 ans ?
P : Dans 10 ans j’aurais 32 ans. Je pense que je me vois avec des enfants, j’adore les enfants, j’écris des livres pour les enfants. Selon moi le rôle d’une femme ce n’est pas du tout d’avoir des enfants, par contre je pense que c’est mon rôle à moi parce que je les aime tellement que je pense que je ferais bien ce travail-là, même si parfois je me dis que c’est un peu égoïste. A part ça, j’aimerais bien continuer à concevoir des livres pour les enfants, en sortir un par an, et puis continuer à faire de la musique, peut-être sous d’autres formes, parfois en français ou encore associer les livres et la musique. Aussi, je ne sais pas si on peut partir sur des trucs de fous mais j’aimerais bien jouer dans un film. J’adorerais continuer à faire des trucs de fous comme ça, parce que ça fait trois ans que je fais des trucs de fous, et j’ai l’impression que ça peut toujours grimper encore et encore. J’aimerais être surprise encore dans 10 ans et être plus zen aussi, plus peace.
LM : Un quartier préféré à Londres ?
P : Je ne connais pas très bien Londres. J’aime bien Brick Lane, mais ça doit être ce que répondent la moitié des gens (rires) Mais c’est super, ici tout le monde est ultra looké, il y a de super trucs à manger, des fripes un peu partout, c’est un quartier de « week-end » mais je ne sais pas si j’aimerais vivre ici, comme je viens du sud de la France, tout ce qui est briques et mauvais temps ça me panique un peu (rires) Sinon Pi Ja Ma a fait son premier concert en Angleterre au Moth Club (Valette Street ndlr) et c’est un très bel endroit, j’ai adoré et j’aimerais beaucoup y retourner.
LM : Si vous deviez organiser un dîner à Londres avec des personnalités vivantes ou mortes, qui inviterez-vous ?
P : Les 4 Beatles, Jesus pour voir si il existe peut-être que ça pourrait être marrant (rires). Ma grand-mère, qui est décédée, mais si j’ai le droit de l’inviter je l’invite, et.. J’ai encore invité que des mecs (rires). Et puis j’inviterais Xavier Dolan pour qu’il filme la scène. J’adore ses films, je suis trop fan, et j’inviterais Axel aussi parce qu’il est drôle. Donc un dîner exclusivement masculin avec ma grand-mère et moi.
LM :Quelle est la personne la plus connue dans vos contacts ?
P : Je pense que c’est Pomme, ou le Dj MYD. Après dans mon Instagram j’ai Angèle.
LM : Kate ou Meghan ?
P : Meghan, elle est plus fun
LM : Beatles ou Rolling Stones ?
P : Beatles !
LM : Londres ou Paris ?
P : Paris. Je ne connais pas trop Londres mais Paris c’est quand même chez moi
LM : Nouvelle star ou XFactor ?
P : Nouvelle star. Je l’ai fait donc c’est un oui (rires)

© Johanna Arnoult
Johanna Arnoult, Solène Lanza
Photos par © Johanna Arnoult