Brexit : avant le vote sur l’accord, les opinions se confrontent toujours
Tout au long de la journée du 15 janvier, Brexiters et Remainers ont manifesté côte à côte devant les maisons du Parlement de Westminster. A partir de 19 heures ce soir, les députés vont voter l’accord de retrait de Theresa May, un moment clé dans le processus politique du Brexit. Londres Mag était sur place pour capter les réactions des Britanniques.
Lundi 14 janvier, les Lords britanniques ont pris une décision capitale : aucun No Deal ne pourra être adopté si l’accord de Theresa May est rejeté. Ce retournement de situation rend le vote de ce soir encore plus décisif. Alors que les débats sont houleux à l’intérieur du Parlement, les opinions étaient très divergentes parmi les manifestants. Quelques témoignages recueillis dans une ambiance électrique et éclectique :
Dans ses bottes aux couleurs du Royaume-Uni, la chanteuse Madeleina Kay a accompagné les Remainers en chanson. Guitare à la main, elle a entonné des textes pour demander l’arrêt du Brexit.
« La musique est un très bon moyen de protester, cela capte l’attention sur notre message et cela ajoute de l’émotion à nos idées », lance-t-elle avec enthousiasme. (« Music is a brilliant way to protest, it gets attention, it draws people to your message and it makes an emotional argument »). Et si, juste à côté, quelques pro-Brexit tentent d’étouffer couvrir sa mélodie, la Jeune Européenne de l’Année 2018 (Young European of the Year) ne se dégonfle pas : « Nous sommes là pour cela, ça fait partie du débat démocratique ! » (« That’s what we’re here to do, it’s all part of the democratic debate ! »)
La deuxième militante que Londres Mag a rencontré s’appelle Belinda. Préoccupée par ses enfants qu’elle a amenés à la manifestation, la mère de famille défend néanmoins avec vigueur sa position pro-Brexit. De manière un peu confuse, Belinda nous explique qu’elle aime l’Europe, mais pas ce que l’Union européenne est devenue :
« J’aime l’Europe, j’aime les Européens, mais les institutions de l’Union Européenne sont en train de péricliter, ils utilisent la contrainte et la censure juste pour faire croire qu’ils sont légitimes. Ce ne sont pas les amis de la démocratie. Ils organisent à nouveau des referendums quand les gens s’élèvent contre l’Union Européenne, mais pas quand ils l’approuvent. […] La montée du populisme et la montée de l’extrême droite s’expliquent souvent parce que les gens n’écoutent pas, parce que l’Union Européenne n’écoute pas. Ils disent que nous sommes racistes, d’extrême-droite, populistes. Ils mentent. Nous sommes juste des gens normaux. […] Alors que nous votons contre Bruxelles, le Parlement collabore toujours avec. […] J’espère que la France retrouvera également sa souveraineté nationale. […] La presse parle toujours d’Européens et d’Europe. C’est un mensonge. Ils font cela pour contrecarrer nos votes. »
(« I love Europe, I love Europeans, but the EU institutions are failing, they are using coercion and censorship just to remind legitimate. They are not a friend of democracy. They re run referendums when they go against the EU but the don’t re run them when they are for the EU. […] The rise of populism and the rise of the far right is often because people don’t listen, because the EU doesn’t listen. It calls us racist, far right, populism. They are lying. We are just normal people. […] But, when we vote against it, our Parlement is working with Brussels. […] I hope France regains it national sovereignty too. […] It is always reported in the press about Europeans and Europe. It’s a lie. They do that to stop our vote. »)
Au premier abord un peu en retrait, Cathy a retrouvé toute sa vigueur quand elle a expliqué à Londres Mag ses convictions. Portant un béret aux couleurs de l’Europe, elle a insisté sur les bienfaits de l’Union européenne :
« J’aimerais que le Royaume-Uni reste dans l’Union européenne parce que le pays bénéficie grandement de sa position de membre d’un point de vue économique, mondial, personnel mais aussi d’un point de vue de la citoyenneté européenne. Parce que je jouis de ma liberté de mouvement, mes droits humains sont protégés, les droits des femmes aussi. Pour moi, c’est de la folie de quitter l’Europe. […] Si le vote est rejeté, j’espère qu’un second referendum sera organisé. Je pense que les Britanniques pourraient voter pour rester dans l’Union européenne. […] Mais même si nous la quittons, d’ici une génération, nous présenterons une demande de réintégration. […] Personnellement, je ne trouve pas que Corbyn serait bénéfique au pays parce qu’il veut également quitter l’Union européenne. »
(« I’d like the UK to remain in the EU because the country benefits massive from EU membership economically and also on a global position, and on a personal level, my EU citizenship, because I also benefit my freedom of movement, it protects my human rights, women rights and for me leaving the EU is crazy. […] If we get a « no » vote, I hope that it might needs a second referendum. I think we would possibly vote « remain ». […] But even if we leave the EU, I think within a generation we’ll be applying to rejoin. […] Personally, I don’t think Corbyn would be good for the country cause he wants to leave the EU as well. »)
Une pancarte « Vote means Vote » (« Un vote, c’est un vote ») à la main, un quinquagénaire qui n’a pas souhaité donner son nom espère une sortie sans accord et un changement de gouvernement.
« Pas seulement Theresa May, mais si ce soir son accord ne passe pas, je ne vois pas ce qu’elle pourrait devenir avec son parti. La raison principale de mon vote Pro-Leave est la politique de la pêche. L’UE ne fait que nous dicter des lois, nous obligeant à nous conformer à son règlement.»
(« At the present moment, I think we need a change of government, not just Theresa May but if she fails tonight, I don’t see where she would go with the party. The main reason that I’ve voted to leave the EU is because of fishing policy. The EU just dictates rules about how we have to abide by their rules »).
Emilie Moulin, Thalia Creac’h, © Camille Delpech